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vendredi 12 août 2011

Burundi : Il faut cesser de harceler les avocats et les journalistes

Les détracteurs du gouvernement s’exposent régulièrement à des arrestations et à des interrogations







Les détracteurs du gouvernement s’exposent régulièrement à des arrestations et à des interrogations





(New York, le 11 août 2011) – L’arrestation d’avocats par les autorités burundaises et les campagnes d’intimidation lancées par celles-ci à l’encontre de journalistes sont préoccupantes, ont déclaré Human Rights Watch et le Comité de protection des journalistes(Committee to Protect Journalists) aujourd’hui. Bien que la libération de deux des trois avocats arrêtés mi-juillet 2011 constitue une démarche positive, le gouvernement devrait immédiatement cesser de harceler tant les avocats que les journalistes, ont commenté les deux organisations. La procédure lancée contre l’un des avocats libérés reste en cours, tandis qu’un troisième avocat, également arrêté fin juillet, demeure en détention pour des chefs d’accusation qui semblent porter atteinte au droit international.

« Les avocats et les journalistes ne devraient pas avoir à redouter d’être harcelés, voire arrêtés, lorsqu’ils communiquent entre eux », a affirmé Daniel Bekele, directeur de la division Afrique à Human Rights Watch. « Les procureurs burundais devraient imposer le respect de la protection juridique des droits humains et non pas punir les individus qui exercent leurs droits. »

Le 15 juillet, un procureur burundais a ordonné l’arrestation d’une avocate, Me Suzanne Bukuru, pour « complicité d’espionnage » après qu’elle avait facilité une entrevue entre ses clients, plaignants dans une affaire de viol, et des journalistes français qui exerçaient leurs activités au Burundi en toute légalité. Me Bukuru a été mise en liberté provisoire le 1er août, la procédure étant toujours en cours.

Le 27 juillet, des policiers ont arrêté Me Isidore Rufyikiri, bâtonnier du Burundi, pour « outrage à magistrat » après son intervention lors d’un rassemblement dans la capitale, Bujumbura, en soutien à Me Bukuru. Me Rufyikiri a été relâché le 5 août et les accusations portées contre lui ont été abandonnées.

Des membres de l’ordre des avocats du Burundi ont fait grève la dernière semaine de juillet pour montrer leur solidarité avec Me Rufyikiri et Me Bukuru. Cette semaine, environ 70 membres de l’ordre des avocats du Burundi ont entamé un sit-in devant la cour d’appel afin de protester contre la détention d’un autre avocat, Me François Nyamoya, porte-parole du parti d’opposition Mouvement pour la solidarité et la démocratie (MSD),arrêté le 29 juillet.

Me Nyamoya, qui a été accusé de subornation de témoins dans une affaire d’assassinat remontant à 2003, est également l’avocat d’un journaliste radio, Bob Rugurika, assujetti à plusieurs reprises à des harcèlements de la part du gouvernement. Les accusations portées contre Me Nyamoya s’appuient sur un nouveau code pénal qui n’était pas en vigueur au moment du délit présumé. Ces accusations ont été soumises à une prescription de trois ans pour infractions mineures commises au regard de l’ancien code pénal.

La Charte africaine des droits de l’homme et des peuples et le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, auquel adhère le Burundi, interdisent strictement l’application rétroactive de sanctions et de délits pénaux.

En outre, les autorités ont à maintes reprises soumis des journalistes à des actes d’intimidation suite à la diffusion d’émissions perçues comme critiquant le gouvernement. Ainsi, depuis le 18 juillet, Rugurika, rédacteur en chef de la Radio publique africaine (RPA), a été convoqué quatre fois par le bureau du procureur public de Bujumbura afin de s’expliquer sur la diffusion récente d’émissions consacrées aux développements politiques. Ces harcèlements ont commencé après que la RPA avait diffusé un reportage sur un appel au dialogue lancé par un parti d’opposition et couvert la conférence de presse de la coalition de l’opposition. Un procureur a accusé Rugurika de diffuser « des informations incitant à la désobéissance civile ».

Par ailleurs, un reportage de la RPA a révélé que l’un des agents devant faire partie d’un comité chargé de la conception d’un projet de commission vérité et réconciliation était lui-même cité, dans un rapport de l’ONU sur les crimes contre l’humanité publié en 1996, comme étant l’auteur présumé de délits. Après la diffusion de cette émission, le bureau du procureur public a accusé Rugurika de diffuser des propos « incitant à la haine ethnique ».

Patrick Mitabaro, rédacteur en chef de la Radio Isanganiro, a également été convoqué formellement par les procureurs afin de s’expliquer sur les informations communiquées sur ses ondes. Le 3 mai, il a été accusé de « diffusion d’informations pouvant porter atteinte à la sécurité de l’État » après la transmission d’un entretien avec un chef de l’opposition en exil mettant en cause un projet de loi du gouvernement selon lequel tous les partis politiques devraient redemander un agrément sous six mois. Le 1er août, Mitabaro a été accusé de « diffusion de propos injurieux à l’égard de la magistrature » après avoir retransmis un entretien avec Me Rufyikiri dans lequel il prétendait que certains juges déshonoraient le système judiciaire à travers leurs actes.

Me Rugurika et Me Mitabaro ont été convoqués une nouvelle fois dans le bureau du procureur public le 9 août afin d’y être interrogés.

« Il est extrêmement inquiétant qu’au Burundi, des journalistes fassent fréquemment l’objet de harcèlements lorsqu’ils diffusent ou publient des opinions perçues comme critiquant le gouvernement », a commenté Mohamed Keita, coordinateur du plaidoyer pour l’Afrique du Comité de protection des journalistes. « Les innombrables convocations formelles de journalistes devant les autorités judiciaires semblent conçues pour les intimider et les empêcher de faire leur travail légitime. »

Informations de fond
Au regard du droit burundais, le président du pays est aussi chef du conseil de la magistrature, ce qui révèle un manque de séparation des pouvoirs entre les deux branches du gouvernement et rend le système judiciaire susceptible à une ingérence politique. En 2009 et 2010, Human Rights Watch a relevé plusieurs cas de juges mutés ou menacés car leurs décisions n’avaient pas été considérées favorables au gouvernement ou au parti au pouvoir.

Il s’en est suivi que des journalistes, des avocats et des personnalités de la société civile ont fait l’objet d’une série d’arrestations et de citations à comparaître pour motifs politiques. Bien que le gouvernement ait semblé faire preuve d’un respect accru envers la liberté d’expression en tolérant une manifestation de journalistes au mois d’avril, des agents du gouvernement et de la magistrature tentent en permanence d’intimider des journalistes et des militants de la société civile pour étouffer les critiques et opinions dissidentes publiques et d’affirmer que ceux-ci sont associés à l’opposition politique.

Un journaliste, Jean-Claude Kavumbagu, a passé dix mois en prison pour avoir rédigé un article dans lequel il mettait en doute la capacité de l’État à répondre à d’éventuels attentats terroristes. Il a été acquitté du chef d’inculpation initial de trahison mais jugé coupable de « porter atteinte à l’économie nationale », créant ainsi un précédent néfaste étant donné qu’aucun journaliste n’avait jamais été jugé coupable d’un tel délit. Kavumbagu a été libéré en mai.

Trois autres journalistes ont été arrêtés à la mi-2010 et détenus pendant de courtes périodes. Me Nyamoya, l’avocat, a été arrêté en septembre 2010 pour « menace à la sécurité de l’État » après avoir demandé au président de congédier certains membres des services de sécurité. Il a été libéré sous caution au bout de trois semaines.

Les différentes décisions prises par le système judiciaire dans le cadre d’affaires relatives à des délits contre les détracteurs du gouvernement soulèvent également des interrogations quant à sa neutralité. Par exemple, s’agissant du dossier d’Ernest Manirumva, un militant anti-corruption tué en avril 2009, les procureurs se sont abstenus de donner suite aux recommandations du Bureau fédéral d’investigation selon lesquelles des agents de police et des renseignements haut placés auraient dû être interrogés sur le délit. Un tribunal a maintes fois reporté les audiences relatives à cette affaire sans pour autant fournir de motif satisfaisant.


Source: HWR

mardi 9 août 2011

Vers la publication de la liste des magistrats qui "font la honte au Burundi"



Au Burundi, les avocats manifestent à nouveau

Le bras de fer entamé avec l'arrestation de trois avocats en juillet entre le pouvoir et l'ordre des avocats du Burundi, se poursuit. Les avocats ont relancé depuis lundi 8 août 2011 leurs manifestations devant le palais de justice de Bujumbura, pour réclamer la libération de leur dernier confrère encore en prison.

Les avocats burundais se disent plus déterminés que jamais. Ils ont annoncé qu’ils vont manifester chaque matin pendant une semaine devant le palais de justice, en attendant la libération de leur confrère.

Après la libération de leurs deux confrères la semaine passée, les avocats du Burundi se disent plus déterminés que jamais. Environ soixante-dix, portant tous la toge, ont repris hier matin leur manifestation devant le palais de justice de Bujumbura. Une lampe ou une bougie allumée, dans une main, une pancarte exigeant la libération de Me François Nyamoya, dans l’autre, les avocats burundais ont voulu dénoncer silencieusement l’arrestation et la détention, illégales à leurs yeux, de leur Confrère.

« C’est un signe pour dire que nous sommes à la recherche d’une justice perdue », a expliqué Me Gervais Rufyikiri, le bâtonnier burundais.

Me François Nyamoya, porte-parole d’un parti burundais d’opposition, est poursuivi pour subornation de témoins dans une affaire qui remonte à 2003. Selon la loi burundaise, un tel délit est prescrit après trois ans. Beaucoup se demandent donc pourquoi cet avocat a été jeté en prison.

Le bâtonnier burundais, qui sort juste de prison pour outrage à magistrat suite aux propos tenus au cours d’une manifestation en faveur d’une consœur qui avait été arrêtée, n’a pas mâché ses mots encore une fois.

« Tous ces magistrats qui s’emploient à arrêter des gens illégalement pour les jeter en prison, nous allons les recenser et les publier à la face du monde, parce que ils font la honte à ce pays », a déclaré Me Rufyikiri.

Les avocats ont annoncé qu’ils vont manifester chaque matin pendant une semaine devant le palais de justice en attendant la libération de leur confrère.

Source:RFI

dimanche 7 août 2011

Le gouvernement burundais harcèle des stations de radio indépendantes

LE COMITÉ POUR LA PROTECTION DES JOURNALISTES
330 7th Avenue, 11th Fl., New York, NY 10001 USA
www.cpj.org






Le gouvernement du président du Burundi, Pierre Nkurunziza, tente de museler les médias remettant en cause la gestion de son administration à travers le harcèlement judiciaire incessant de deux des principales stations de radio indépendantes du pays, a déclaré aujourd'hui le Comité pour la protection des journalistes (CPJ).

Depuis que le président Nkurunziza a raflé les élections présidentielles et parlementaires de 2010 boycottées par l'opposition, son second mandat a été critiqué par des organisations internationales de défense des droits de l'homme pour des violations des droits humains, notamment l'emprisonnement pendant 10 mois du journaliste Jean-Claude Kavumbagu. Des troubles violents menacent également un accord de paix fragile signé après treize ans de guerre civile, selon des médias. Ces dernières semaines, les procureurs de l'administration de M. Nkurunziza et l'organe nationale de régulation des médias, le Conseil national de la Communication (CNC), contrôlé par le gouvernement, ont recouru à des convocations incessantes au tribunal, à l'emprisonnement et à des menaces de fermeture contre les 2 principales stations de radio indépendantes, par la Radio Publique Africaine (RPA) et la Radio Isanganiro, selon des recherches du CPJ. Ces stations soulèvent régulièrement des questions critiques sur les sujets d'actualité et la gestion du gouvernement.

"Le harcèlement judiciaire constant pratiqué par les autorités burundaises est une claire tentative visant à dissuader tout reportage indépendant par ces stations de radio privées", a déclaré Tom Rhodes, consultant du CPJ pour l'Afrique de l'Est. "Les autorités burundaises, notamment le CNC, doivent permettre à ces stations de travailler en paix, sans utiliser un système judiciaire politisé en vue de les réduire au silence", a-t-il martelé.

Lundi dernier, les procureurs de Bujumbura, la capitale burundaise, ont convoqué Patrick Mitabaro, rédacteur en chef de Radio Isanganiro, pour la deuxième fois depuis juillet, a dit au CPJ Désiré Hatungimana, reporter de ladite station. M. Mitabaro a été accusé par des procureurs d'outrage à la justice pour avoir diffusé des propos de Me Isidore Rufyikiri, le bâtonnier de l'Ordre des avocats du Burundi actuellement emprisonné, qui avait déclaré que les tribunaux étaient sous contrôle du pouvoir exécutif burundais, selon des journalistes locaux. Il convient de noter que dans un rapport en mai 2011, l'expert indépendant des Nations Unies sur la situation des droits de l'homme au Burundi, Fatsah Ouguergouz, avait exprimé de sérieuses inquiétudes au sujet du "manque d'indépendance de la justice" au Burundi.

Auparavant, M. Mitabaro avait été convoqué mardi dernier pour un autre interrogatoire dans une autre affaire inconnue, a dit M. Hatungimana. En mai dernier, ce journaliste avait été convoqué et accusé de diffusion d'informations ayant prétendument porté atteinte à la sûreté de l'Etat, pour une interview au cours de laquelle l'ancien porte-parole d'un parti d'opposition avait critiqué une proposition du gouvernement pour la réforme des partis politiques, selon des médias.

Bob Rugurika, rédacteur en chef de la RPA, a également été interrogé lundi dernier par le procureur de la République-la quatrième fois depuis le 18 juillet dernier-pour une émission ayant soulevé des interrogations sur l'intégrité de Léonce Ndarubagiye, un ancien gouverneur de province et membre d'une commission chargée de la mise en place de la Commission Vérité et Réconciliation du Burundi, selon des journalistes locaux. La RPA avait cité un rapport de l'ONU daté de 1996 qui impliquait M. Ndarubagiye dans un massacre de Tutsis. Immédiatement après l'émission, le 23 juillet dernier, le président du CNC, Pierre Bambasi, a publié un communiqué déclarant que la diffusion de telles informations constituait une "incitation à la haine ethnique, et donc capable d'avoir des effets négatifs sur la réconciliation et la sécurité de la population", selon des médias.

Par la suite, M. Rugurika a été convoqué par un magistrat pour un autre interrogatoire, le 9 août courant, au sujet d'une autre affaire inconnue, a dit le journaliste au CPJ. Lors d'un interrogatoire précédent le 18 juillet dernier, les procureurs l'avaient accusé de diffusion d'informations "susceptibles d'inciter à la désobéissance civile" dans le cadre d'émissions consacrées à des partis d'opposition, notamment le Front pour la démocratie au Burundi et l'Alliance des démocrates pour le changement, selon des journalistes locaux.

Des journalistes de la station de la RPA dans la ville de Ngozi, au nord du pays, ont également été convoqués. Vendredi et lundi derniers, un procureur de la République a interrogé le chef de cette station, Léonce Niyongabo, ainsi que son reporter, Yvette Murekesabe, au sujet d'un article ayant impliqué un membre des services de sécurité de l'Etat dans un viol, selon des journalistes locaux.

Par ailleurs, à travers une action considérée comme un moyen de contrecarrer la défense juridique de la RPA, les autorités burundaises ont emprisonné le 29 juillet dernier l'avocat de ladite station de radio, François Nyamoya, sous de fausses accusations de subornation de témoins dans le cadre d'une affaire dans laquelle il avait défendu avec succès un suspect dans l'assassinat en 2001 du représentant résidant de l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) au Burundi, Kassy Manlan, selon des journalistes locaux. Cette affaire est classée depuis 2003, et le code de procédure pénale du Burundi interdit les poursuites pour une infraction dans le cadre d'une affaire classée pendant plus de trois ans, selon les mêmes sources.

Cette année, les autorités burundaises ont constamment harcelé la RPA et Radio Isanganiro pour leurs reportages. En avril dernier, elles avaient imposé une suspension de quatre jours à une émission-débat populaire de la RPA. En outre, quatre journalistes de la RPA, Zirampaye Raymond, Domithile Kiramvu, Bonfils Niyongere et Philbert Musobozi, ont été accusés de diffamation pénale par Evrard Giswaswa, le maire de Bujumbura, pour des reportages en octobre 2010 sur une prétendue bagarre de M. Giswaswa dans une boîte de nuit, selon la presse locale.


Source: CPJ