Le journal d'analyses qui vous permet d'acceder à l'actualité burundaise de manière objective et professionnelle.

Rechercher dans ce blog

samedi 5 novembre 2011

L’opposition burundaise craint un "nettoyage"

Plusieurs enseignants des provinces Ruyigi et Cankuzo, dans l’est du Burundi, ont fui leurs ménages par crainte pour leur sécurité. Les rumeurs circulent qu’un plan dit "safisha" qui signifie "nettoyer", mis sur le dos du parti au pouvoir CNDD-FDD, consisterait à éliminer tout opposant.

"Plusieurs membres du parti FNL à Ruyigi ont récemment été tués et d’autres sérieusement tabassés par les jeunes du CNDD-FDD", déclare un enseignant de Nyabitsinda dans la province de Ruyigi. Selon lui, le plan d’éliminer les FNL, Forces Nationales de Libération fidèles au Hutu Agathon Rwasa, dans cette province, est exécuté par la ligue des jeunes du parti au pouvoir (Conseil national pour la défense de la démocratie-Forces de défense de la démocratie, CNDD-FDD, sous le Hutu Pierre Nkurunziza) en collaboration avec la police nationale.

Au Burundi, les personnes instruites deviennent souvent des enseignants. Par conséquent, elles sont fréquemment choisies pour représenter différentes formations politiques au niveau provincial et communal.

Peur et persécutions

De peur, 25 enseignants résidant dans la province de Ruyigi ont abandonné leur travail. 17 d’entre eux ont déjà fui leurs localités par crainte pour leur sécurité, suite aux persécutions dont ils se disent victimes. Huit autres sont incarcérés à la prison de Ruyigi, accusés de collaboration avec des groupes armés. Selon leurs familles, ces détenus sont membres de différents partis de l’ADC-Ikibiri, une coalition de plus de dix partis politiques de l'opposition burundaise.

Un autre enseignant, arrêté deux fois de suite puis relâché, dit que cette chasse à l’homme contre les opposants serait planifiée par le ministre de l’Energie et des Mines, Moïse Bucumi. "Au cours du mois de septembre, j’ai rencontré le ministre Moïse Bucumi à pied en compagnie de policiers et des militaires. J’allais au chef lieu de la province acheter une plaque solaire. Après l’achat, sa garde m’a arrêté et conduit à la brigade. Quand j’ai demandé la raison de mon arrestation, l’officier de police judiciaire m’a répondu que c’est le ministre qui se trouvait être à la base de mon arrestation", poursuit-il.

Rumeurs et accusations

Ces accusations sont soutenues par un ancien membre de l’aile des jeunes du parti CNDD-FDD. L’homme qui requiert l’anonymat dit d’avoir eu la tâche d’éliminer des opposants. Mais la compassion qu’il a montrée en alarment certaines personnes ciblées, a failli causer sa perte. "Quand j’ai révélé le plan, ils (le CNDD-FDD), ndlr) m’ont pris pour traitre. Moi j’avais fait cela pour sauver la vie d’un être humain car nous sommes tous crées par Dieu. Ils m’ont pris et m’ont allongé sur le dos, en me disant qu’ils allaient me castrer. Je les ai supplié et après j’ai eu la chance de les échapper. Et je me suis exilé". Ce jeune homme implique cinq hautes autorités du pays et du parti au pouvoir dans les différents cas d’exécutions des membres de l’opposition dans l’est du Burundi.

Il précise que dans une réunion des jeunes du CNDD-FDD en mois d’Août 2011, à l’école primaire de Masama, on leur aurait donné un agenda de travail. L’objectif visé n’était autre que d’éliminer tous les FNL. Selon lui, un membre FNL tué rapporte la somme de 60.000 francs burundais (35 €), en cas d’échec 20.000 francs (12€). "Autre chose", souligne-t-il, "on nous a dit que celui qui dévoilera le secret sera pendu ou cloué au bec par un cadenas. Et les clés de ce cadenas seront jetées dans le Lac Tanganyika pour être retrouvées au retour du Christ sur Terre".

Inquiétudes et harcèlement

"Tout cela fait que les membres des partis de l’opposition sont pris de panique. Dès la tombée de la nuit, tous fuient leurs ménages", ajoute l’enseignant de Nyabitsinda. Ce phénomène est aussi observé dans la province Cankuzo. 16 personnes originaires des communes Cendajuru et Gisagara sont accusées de collaborer avec des groupes armés et sont incarcérés à la prison de Cankuzo. Parmi elles, se trouvent des cultivateurs, des commerçants, des infirmiers et des enseignants. Leurs familles parlent d’un harcèlement lié à leurs opinions politiques. Le procureur de la République à Cankuzo, lui, répond que ces arrestations sont liées aux enquêtes sur la mort de deux personnes tuées par des groupes armés.

Depuis la fin de la guerre civile en 2005, la présence présumée de listes noires sème la peur dans de la population burundaise. Pendant que l’opposition blâme le parti au pouvoir d’être l’auteur de ces listes, les autorités burundaises accusent l’opposition d’être à l’origine de ces rumeurs afin de déstabiliser le pays.

Source: Radio Nederland Wereldomroep

Aucun commentaire: