La Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) et son organisation membre au Burundi, la Ligue ITEKA, regrettent vivement les événements ayant entouré et suivi les élections communales du 24 mai 2010 et appellent l’ensemble des acteurs politiques burundais à tout mettre en œuvre pour garantir la crédibilité du processus électoral, déterminant pour le maintien de la paix et le renforcement de l’État de droit dans ce pays.
Les élections communales, premières des cinq élections prévues cette année au Burundi, avaient valeur de test pour le bon déroulement de l’ensemble du processus électoral. Si aucun incident sécuritaire majeur n’est à déplorer le jour du scrutin, certaines irrégularités auraient entouré le processus : non respect des horaires d’ouverture et de fermeture de certains bureaux de vote, achat de votes, bulletins de vote non mis dans les enveloppes, absence du double comptage des voix, port de signes distinctifs de partis politiques, actes d’intimidation à l’encontre des électeurs, dispositions d’isoloirs sans garantie du secret de vote, etc.
Si le caractère « massif » de ces irrégularités, avancé par les principaux partis d’opposition, doit encore être démenti ou non par la Commission électorale nationale indépendante (CENI), cette dernière doit jouer pleinement son rôle d’apaisement et utiliser tous les moyens légaux à sa disposition pour garantir la poursuite d’un processus régulier, inclusif et surtout sécurisé. La FIDH et la Ligue ITEKA s’inquiètent en effet des actes de violences survenus dans certaines communes pendant la campagne et suite à l’annonce des premiers résultats provisoires.
Pendant la campagne électorale, nous pouvons entre autres citer l’assassinat d’un membre du parti MSD dans la commune urbaine de Nyakabiga par des hommes en uniforme. Le 28 mai 2010, le Vice-Président du parti UPD-Zigamibanga, a été victime d’une attaque à la grenade dans la commune de Buhinyuza en province de Muyinga au nord de Bujumbura. Il est décédé des suites de ses blessures. Le 29 mai 2010, des affrontements ont éclaté dans le quartier de Kinama, au nord de Bujumbura, entre forces de police et militants de partis de l’opposition suite à la découverte d’une urne contenant, selon ces derniers, des bulletins de vote non décomptés. Ces affrontements ont conduit à l’arrestation et à la détention de plusieurs membres de l’opposition.
Ces actes de violence sont le signe d’une tension manifeste et qui, conjugués à la crise politique actuelle, consécutive au retrait des candidatures de six des sept candidats à l’élection présidentielle du 28 juin prochain(1), risquent fortement de remettre en cause la crédibilité de l’ensemble du processus électoral. « Comme démontré dans notre rapport d’enquête(2) publié à la vielle du premier scrutin, le bon déroulement des élections, tant attendues par les citoyens burundais, revêt une importance capitale pour le maintien de la paix et le renforcement de l’État de droit dans ce pays. La classe politique burundaise dans son ensemble mais également les acteurs internationaux impliqués dans ce processus doivent tout mettre en œuvre pour garantir la crédibilité de tous les scrutins » a déclaré M. Dismas Kitenge, Vice-Président de la FIDH.
La FIDH et la Ligue ITEKA appellent :
* La CENI à prendre toutes les mesures nécessaires, en utilisant tous les moyens légaux à sa disposition, dont le Code électoral, pour garantir l’organisation d’un processus électoral libre, sécurisé et crédible, permettant à tous les acteurs d’y adhérer ; à faire le suivi des plaintes déposées par les partis politiques de l’opposition ;
* L’ensemble de la classe politique au calme et à observer une politique responsable et non violente ; et à se conformer strictement aux dispositions du Code électoral et du Code de bonne conduite ;
* Les autorités burundaises à prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir la sécurité des membres des partis politiques et de l’ensemble des citoyens burundais ; et à garantir en toutes circonstances l’intégrité physique et psychologique des personnes arrêtées et détenues et de leur garantir le droit à un procès juste et équitable ;
* La justice burundaise à enquêter sur les cas d’assassinats survenus pendant et après la campagne électorale, à poursuivre et juger les auteurs ;
* Les forces de police et de sécurité à respecter les dispositions des instruments nationaux et internationaux de protection des droits de l’Homme dans l’accomplissement de leur mandat ;
* Les médias à se conformer strictement au Code de bonne conduite et à faire preuve de vigilance et de professionnalisme ;
* La communauté internationale et en particulier le Secrétaire Général des Nations Unies, M. Ban Ki Moon, attendu au Burundi le 9 juin 2010, à appeler publiquement les partis politiques et leurs militants au calme et à rappeler l’importance du bon déroulement de ces scrutins pour le maintien de la paix et le renforcement de l’État de droit au Burundi, en adoptant des positions neutres et réfléchies, tenant compte de la situation réelle sur le terrain.
(1)Le mardi 1er juin 2010, Agathon Rwasa (FNL), Domitien Ndayizeye (FRODEBU), Alexis Sinduhije (MSD), Léonard Nyangoma (CNDD) et Pascaline Kampayano (UPD), ont annoncé le retrait de leur candidature à l’élection présidentielle du Burundi prévue le 28 juin prochain. Le vendredi 4 juin 2010, Yves Sahinguvu, Premier Vice-Président et candidat de l’UPRONA, a également annoncé le retrait de sa candidature à la présidentielle.
(2)Cf. le rapport conjoint de la FIDH et de la Ligue Iteka intitulé : « Les élections de 2010 : un test à ne pas rater pour consolider la paix », publié le 4 mai 2010.
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