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mercredi 20 janvier 2010

Rapport d’observation sur la Gouvernance au Burundi au cours du second semestre 2009

SOMMAIRE EXECUTIF
Au cours du second semestre 2009, comme au premier la gouvernance porte les marques des élections prochaines même si elles sont annoncées pour la deuxième moitié de 2010. Déjà, les états-majors des partis politiques rivalisent d’ardeur dans leurs déploiements de mobilisation et propagande dans le pays. Ceux-ci sont ostentatoires pour le parti au pouvoir qui contrôle l’essentiel de l’administration et beaucoup plus feutrés pour les autres formations politiques, qui se heurtent régulièrement au courroux des administratifs agissant vraisemblablement sur les consignes du parti au pouvoir.



Alors que face aux inquiétudes soulevées par les tensions et les violences politiques, le Président de la République dans ces différents messages ne cesse de rassurer, en affirmant que les élections de 2010 se dérouleront mieux que les précédentes, les faits semblent prouver le contraire.

Certains signes ne trompent pas. Après avoir surmonté l’épreuve de mise en place de la Commission Electorale Indépendante, l’adoption du Code électoral a failli briser les quelques ressorts de dialogue qui subsistaient au sein de la classe politique. Le parti au pouvoir a tenté un forcing pour faire valider des dispositions supposées accroître ses chances de victoire aux élections de 2010. Il s’agissait essentiellement de l’ordre des scrutins, qui pour le parti au pouvoir devait commencer par les présidentielles, du nombre de cartes à utiliser et des dispositions portant sur l’organisation et le fonctionnement de la CENI, qui selon la proposition présidentielle, devait être déterminé par un décret. Les Ministres issus du FRODEBU n’ont pas hésité de craquer la porte du Conseil des Ministres quand ils ont réalisé que le contenu du projet de code s’écartait sensiblement de celui qui avait été convenu au sein des Cadres de dialogue. Un document signé par 14 partis politiques a été adressé au Secrétaire Général des Nations Unies dénonçant le refus du dialogue du Président de la République.

Après de nombreuses valses du code, du Conseil des Ministres à l’Assemblée Nationale, les appels au dialogue autour d’une loi d’une si haute importance pour la paix et la démocratie finirent par avoir gain de cause. Alors que la situation semblait se calmer, la CENI a continué d’être la cible de critiques de remises en cause par quelques ténors du parti au pouvoir, en particulier de son Secrétaire Général qui a déclaré que son parti n’avait plus confiance dans la CENI[1]. C’est probablement, en raison de cette hostilité que le Ministre de l’Intérieur avait même bloqué quelque 200 millions de francs burundais (162.000 dollars) qui devaient couvrir les frais de fonctionnement de la CENI pour les mois de juillet, août et septembre 2009. Le Ministre reprochait à la CENI d’avoir recruté 57 de ses cadres au sein de l’opposition[2].

Entretemps, les manœuvres de mobilisation des partis sur le terrain se sont poursuivis, culminant par des heurts et des tensions entre les militants des différentes formations politiques. Sur le terrain, les jeunes du parti au pouvoir, dans leurs sports aux allures martiales, ont failli en découdre, à maintes reprises, avec les jeunes du FNL et du FRODEBU qui ont fait de même pour tester l’impartialité de certaines autorités administratives. En effet, certaines d’entre elles étaient tentées de laisser faire, voire encourager les jeunes du parti au pouvoir et sévir à l’égard des autres. Le débat sur la légalité et la réglementation de ce sport a même créé des divergences entre le Ministre de l’Intérieur, tenté de l’interdire, et le Président de la République, qui a vanté les bienfaits de ces pratiques.



Cette effervescence liée à la campagne électorale empoisonne les rapports entre les partis politiques. La fébrilité née de cette compétition fait que les responsables des partis recourent à tous les stratagèmes possibles pour porter des coups aux autres en vue de les affaiblir. Dans ce jeu, le parti au pouvoir tire sur les courroies politiques et administratives, pour restreindre les libertés d’action des autres partis politiques, voire provoquer leur implosion comme cela a été tenté pour le FNL.



S’agissant du fonctionnement de la justice, les consultations populaires sur la mise en place des mécanismes de justice transitionnelle, après de nombreuses remises, sont sur le point d’être conclues. Mais la justice peine à venir à bout du dossier qui a défrayé la chronique, celui de l’assassinat d’Ernest Manirumva, en raison d’immixtions et d’interférences de personnalités influentes de l’Exécutif dans ce dossier. La persévérance et la détermination de la société civile dans le suivi de ce dossier, et dans celui de Salvator Nsabiriho, a contribué à envenimer les rapports entre les pouvoirs publics et la société civile. C’est notamment en raison de ce motif que le Ministre de l’Intérieur a décidé d’annuler l’agrément de FORSC, sur une base que beaucoup d’analystes avisés considèrent comme illégale. Derrière cet acte, la volonté de faire taire les organisations dynamiques et critiques de société civile est manifeste.



Le paysage économique a été caractérisé, en partie par des ajustements et des réformes consécutifs à l’entrée du Burundi dans la Communauté Est africaine. Il s’agit notamment de la création de l’Office Burundais des Recettes (OBR) qui peine malheureusement à se mettre en place. Sa direction par un expatrié n’est pas vu d’un bon œil par certains qui préfèrent qui préfèrent, au moins pendant un temps, garder la main sur la direction des douanes et des impôts qui constituent une source importante de prébendes. Aussi, face aux incertitudes créées par l’imminence des élections, la corruption et les malversations économiques ont franchi un nouveau cap et se pratiquent au vu et au su de tout le monde, la corruption est tout simplement en passe d’être institutionnalisée, cela d’autant plus que la contagion vient d’en haut[3]. Cette tendance est confirmée par le dernier rapport Transparency International qui classe le Burundi à la 168ème position sur 180 pays[4]. Il se trouve à 7 places derrière la RD Congo qui était demeurée pendant longtemps une sorte de repoussoir en la matière. Cette position est donc emblématique d’une étape franchie quant à l’ampleur et la fréquence de la corruption au Burundi. L’attribution du marché des nouvelles plaques d’immatriculation en est l’exemple le plus emblématique.



La gouvernance administrative et sociale est marquée par des dysfonctionnements et des grognes dans certains secteurs. La gestion de l’énergie électrique par la REGIDESO pendant le second semestre en est une illustration, aussi bien par des délestages jamais expliquées, et sa responsabilité par rapport aux préjudices subis par ses clients. La grogne récurrente dans les secteurs de l’Education et de la Santé se sont étendues aux Corps de Défense et de Sécurité où la gestion du malaise a pâti d’un déficit de dialogue. La déstabilisation de ces corps à l’approche des élections est porteuse de dangers.

Le rapatriement des Burundais continue à provoquer des tensions liées aux conflits fonciers qui trouvent difficilement des solutions à travers les divers mécanismes prévus. Egalement, les questions de déplacement des réfugiés banyamulenge et de gestion des demandes d’asile de réfugiés rwandais ont été problématiques. Dans le second cas, le souci de préservation de bons rapports avec le Rwanda a pris le pas sur l’impérative nécessité de respecter les engagements internationaux en la matière.

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Source: Burundi news.

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